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2023-02-19 10:56:01 +00:00
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date: '2022-11-22T08:08:31'
li-id: 7000731729195888642
li-url: https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_coupe-du-monde-2022-le-mirage-de-la-compensation-activity-7000731729195888642-J80S
title: CHANGE_ME 82
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Si cette information rapportée par Le Monde est exacte, la Fédération Internationale de Football (FIFA) a des progrès à faire en matière de compréhension de la science du climat.
De Google à Microsoft, en passant par le transport aérien ou... La Poste, de nombreuses entreprises ou organisations ont affirmé pouvoir réduire leur impact sur le climat à zéro par le biais de la "compensation". La technique est en apparence simple et de bon gout : on compte les émissions associées à l'organisation (idéalement en les limitant au plus petit périmètre possible), puis on achète des "crédits carbone" qui sont censés correspondre à des émissions évitées (ou du carbone séquestré par reforestation) ailleurs, et le tour est joué : plus et moins ca fait zéro.
Sauf que... pour les raisons expliquées en résumé sur https://lnkd.in/dGTt6Zs , cette approche n'a pas de fondement scientifique. Elle donne donc au final l'illusion que l'activité considérée peut continuer comme aujourd'hui dans un monde neutre en carbone, alors que c'est l'exact inverse qui est vrai : dans un tel monde, la quasi-totalité des organisations ou entreprises ne peuvent garder les mêmes clients, pour leur vendre la même chose, fabriquée ou mise à disposition de la même manière.
Par ailleurs la comptabilité même des crédits carbone est très discutable : elle ne tient pas compte du moment effectif d'évitement (maintenant ou beaucoup plus tard), et attribue à l'acheteur du crédit la totalité des émissions évitées par un projet alors même que l'acheteur ne finance qu'une partie de ce qui permet cet évitement.
La FIFA nous raconte donc des salades en considérant que, dans un monde sans émissions du tout, elle pourra continuer à organiser des manifestations demandant 1 million de touristes aéroportés, se rendant dans un stade climatisé, l'ensemble étant financé par des recettes publicitaires de vendeurs de tout un tas de trucs qui ne pourront plus fabriquer une large partie de leurs produits.
Cette affirmation de "neutralité" est - c'est de circonstance - se mettre la tête dans le sable, parce que à l'évidence dans un monde sans émissions les manifestations sportives "planétaires" seront plus rares et plus modestes.
Et, pour parler de neutralité, la bonne approche est de compter séparément sa contribution aux puits et ses émissions induites, et de se demander ce qui passe toujours dans un monde où les émissions globales baissent de 5% par an. Le bagage méthodologique existe pour cela (voir https://lnkd.in/db7JzB2q ), mais s'y lancer demande évidemment plus de courage que de faire un communiqué de presse sans fondement !