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2023-02-19 10:56:01 +00:00
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date: '2022-12-14T11:20:13'
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title: CHANGE_ME 60
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L'Union européenne vient de se doter d'un mécanisme pour protéger les industriels du continent contre leurs compétiteurs étrangers qui n'ont pas à payer pour leurs émissions de gaz à effet de serre. Cette mesure est réclamée depuis longtemps par les milieux économiques au motif - légitime dans son principe - que, pour des produits soumis à la concurrence internationale, payer pour le CO2 renchérit les couts face à la concurrence.
Il y a certes quelques secteurs qui crient un peu fort avant même d'avoir mal. Par exemple le ciment voyage peu, et les échanges internationaux sont faibles. Mais pour d'autres produits de base - et a fortiori manufacturés - c'est plutôt la règle. L'intention européenne est donc pertinente.
Revenons un peu sur les quotas : ils sont attribués site par site (et non par entreprise) pour un peu plus de 10.000 sites très émissifs (centrales électriques, cimenteries, aciéries, etc).
Depuis 2013 la les quotas sont vendus aux enchères. En début de période (car les quotas sont valables pour une période de quelques années), la Commission permet à chaque site concerné de se procurer des autorisations administratives d'émettre (appelées quotas), qui sont payants (vendus aux enchères), et disponibles en quantité limité pour un site donné (https://bit.ly/3YlMJ7m ).
C'est donc payant... mais il y a plein de dérogations permettant d'avoir ces mêmes quotas gratuitement : pour les sites très exposés à la concurrence, pour ceux qui se modernisent, etc (https://bit.ly/3hnL28R ).
L'idée de cette "taxe aux frontières" est justement de pouvoir - entre autres - supprimer ces exceptions parce que les compétiteurs internationaux vont aussi devoir payer quelque chose. En pratique l'Europe ne peut pas taxer des usines situées hors de ses frontières : ce sont les importateurs qui vont devoir acheter des quotas. Ce n'est donc pas une taxe carbone à proprement parler, à savoir un prix fixe par tonne de CO2 émise par les industriels qui exportent des produits en Europe.
Pour savoir combien de quotas les importateurs vont devoir se procurer, il va donc falloir se mettre d'accord sur un "contenu en carbone" par unité de produit importée. Il faudra aussi se mettre d'accord sur la source de ces quotas (achetés sur le marché sans augmentation du volume global de quotas disponibles ? Issus d'une nouvelle enveloppe supplémentaire et vendus aux enchères ? Autre ?), et le mécanisme qui va garantir que le prix moyen à la tonne de CO2 payé par l'importateur sera équivalent au prix moyen payé par l'industriel européen pour la fabrication du même produit (et sur ce dernier point tout n'est pas si simple : une tonne de poutrelle en acier est-elle équivalente à une tonne de feuille d'acier en rouleau ?).
Il n'empêche : cette innovation est bienvenue. Rappelons qu'en France, acier, ciment et chimie de base représentent les 3/4 des émissions industrielles. Ce système de compensation aux frontières interagit avec un gros paquet d'émissions.