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2023-02-19 10:56:01 +00:00
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date: '2022-04-29T07:29:42'
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Vaclav Smil, un "penseur de l'énergie" installé au Canada (il est d'origine tchèque), va sortir un nouveau livre. Cela lui vaut une interview du New York Times où, au risque de passer pour un vieux ronchon (qu'il est peut-être par ailleurs !), il rappelle de manière un peu cash que de se bercer d'illusions en se fixant des objectifs irréalistes ne diminue pas les risques que l'on court.
Il est bien connu que l'on trouve toujours "très pertinents" des gens qui pensent.... comme soi :). Exprimées certes dans un style différent, je n'aurais pas fait des réponses très différentes aux questions posées par le journaliste. Vaclav Smil rappelle que la décarbonation est un chantier de civilisation considérablement plus difficile que l'idée que l'essentiel des activistes du climat (et a fortiori des décideurs) s'en fait (ou que certains économistes, comme ceux qui signent cette tribune en expliquant "qu'il suffit d'investir massivement dans les technologies décarbonées partout dans le monde" pour faire de la croissance verte : https://lnkd.in/eGK_78qt ).
Nous pensons facilement transport ou logement quand il est question d'énergie. Mais Smil rappelle que l'énergie c'est aussi l'industrie de base. Notre civilisation est celle de l'acier (quasiment 2 milliards de tonnes produites en 2021 ; 250 kg par terrien), du ciment (environ 4 milliards de tonnes ; 500 kg par terrien), des plastiques et de la chimie organique (environ 500 millions de tonnes).
Or l'industrie de base - qui produit ces matériaux - c'est plus d'énergie et d'émissions - dans le monde - que l'ensemble des moyens de transport. Il n'y a pour le moment pas de plan pour décarboner cela en 30 ans, et Smil rappelle que dans ce domaine il y a des lois physiques et chimiques qu'il n'est pas possible de transgresser (produire de l'acier vierge demandera toujours de commencer par débarrasser de l'oxyde de fer - le minerai - de son oxygène, et cela demande une quantité incompressible d'énergie).
Smil rappelle que les vitesses d'évolution des systèmes sont lentes, et que de jeter des chiffres en l'air sans avoir réfléchi à la manière d'en faire des objectifs réalistes est contreproductif.
Ce que dit implicitement Smil, c'est que nous ne tiendrons malheureusement pas les objectifs de 1,5°C ou 2°C, parce qu'il est extraordinairement difficile de modifier l'ensemble du corps social à la bonne vitesse. Les pessimistes penseront donc que nous allons droit aux ennuis de plus en plus sérieux.
Les optimistes verront son message comme un impérieux rappel à l'ordre et une invitation toute aussi impérieuse à devenir sérieux sur la question. Les équipes de notre président fraichement réélu qui veut "écologiquement planifier" seraient bien avisées de lire cet interview (ou - ce qui revient au même - de revoir l'équation de Kaya : https://lnkd.in/gAthJhJ ). Fissa !