--- date: '2022-01-25T07:33:57' li-id: 6891644280977330176 li-url: https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_apr%C3%A8s-le-gaz-apr%C3%A8s-l%C3%A9lectricit%C3%A9-revoici-activity-6891644280977330176-aGrZ title: CHANGE_ME 409 --- Après le gaz, après l'électricité, (re)voici les carburants ! Dès la crise du covid, ce qui est en train de se passer était pour partie écrit. Reprenons : début 2020, la demande de pétrole plonge. Du coup les prix aussi. Conséquence, les investissements dans l'exploration-production pétrolière (et gazière, c'est la même) sont divisés par 2. Conséquence un peu plus tard : la production d'or noir n'arrive pas à suivre le regain de la demande, et les prix augmentent. Pour autant, un baril à 85 dollars - c'est haut mais loin du maximum à 130 en moyenne sur 2011 - ne suffit pas à expliquer que le prix à la pompe atteigne des records. Deux autres éléments ont contribué : - l'euro a eu tendance à s'affaiblir face au dollar. Cela renchérit les importations de pétrole (qui s'achète en dollars) à cout du baril constant, - la fiscalité spécifique sur les carburants a augmenté, en particulier celle sur le gazole qui a cru de 50% environ de 2014 à 2018, dans le cadre d'un rattrapage essence-gazole. Notons qu'une partie des taxes spécifiques sur les carburants finance de manière affectée le développement des ENR électriques, qui ne contribuent pourtant pas directement à diminuer la dépendance aux carburants (il eut été plus pertinent, peut-être, de financer le développement du vélo ou des pompes à chaleur - qui n'évitent pas de carburant mais évitent du fioul - avec le même argent...). Si les carburants sont trop chers à cause du prix du pétrole, à bref délai nous ne pouvons rien faire d'autre que subir. De même, le taux de change euro-dollar n'est pas tellement modifiable par le gouvernement français au moment où le pétrole vaut trop cher. Enfin dans le domaine du pétrole il n'y a pas de société publique dont le gouvernement puisse faire les poches, comme cela vient d'être le cas avec EDF. Ne reste donc qu'une baisse de la fiscalité. Mais la TICPE est devenue un impôt de rendement, c'est-à-dire qu'elle est structurellement nécessaire à l'équilibre des finances publiques. Tout baisse, même modeste, se chiffre immédiatement en beaucoup de milliards en moins. Notons au passage que cela signifie que la suppression des combustibles fossiles dans les transports obligera l'Etat à trouver d'autres impôts en remplacement, et pas pour 3 centimes. C'est un des inconvénients d'une fiscalité dissuasive (la taxe carbone) quand son produit devient nécessaire au budget : faire disparaître la nuisance pose un problème aux finances publiques ! En outre, une telle baisse (de la fiscalité) fait désordre face à un discours de "neutralité carbone" dont la traduction en actes est déjà faiblarde. Nous sommes donc un peu coincés. Comme pour l'électricité et le gaz, ce n'est pas au moment où se déclare l'incendie que l'on construit le plan d'évacuation. Ce dernier demande... un plan, et des décennies d'efforts continus ensuite. A défaut, la baisse subie de la production de pétrole engendrera de plus en plus d'épisodes de cette nature, sans remède évident à court terme.