--- date: '2022-02-16T09:16:52' li-id: 6899642717047971840 li-url: https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_r%C3%A9chauffement-climatique-la-for%C3%AAt-fran%C3%A7aise-activity-6899642717047971840-RdCB title: CHANGE_ME 382 --- Le réchauffement climatique ne s'élève "que" à 1,2 °C pour la planète, et cependant cela est déjà suffisant pour conduire le patron de l'Office National des Forêts à affirmer dans Les Echos que "La forêt française est en train de sécher". Et le même d'ajouter que sur 10 % du territoire national nous verrons d'ici dix à vingt ans les effets très concrets du réchauffement (traduire une mortalité sévère). Une des choses que nous devons nous mettre en tête en ce qui concerne le réchauffement est que les effets suivent l'élévation de température avec une inertie plus ou moins grande, mais de manière irréversible. Pour la forêt, quand bien même les émissions planétaires tomberaient à zéro demain matin, les conséquences du réchauffement ayant déjà eu lieu vont s'amplifier à l'avenir, puisque le temps de retour des canicules et sécheresses a déjà diminué (ces dernières sont déjà plus fréquentes), et donc que les conditions sont déjà plus "dures" pour les arbres existants (épicéas, hêtres, chênes...) qui, petit à petit, succombent au stress hydrique. Dans l'Est, explique le directeur général de l'ONF, ce sont les sécheresses à répétition qui ont affaibli les arbres et rendu les conditions favorables à la prolifération d'un insecte (le scolyte) qui finit de les achever. Et il s'agit d'épicéas présents depuis un siècle... La France n'est pas un cas isolé : au Canada et en Sibérie des phénomènes identiques se produisent, auxquels il faut rajouter des incendies qui augmentent, et qui peuvent transformer en peu de temps la forêt existante en un sol quasi-nu. Adapter la forêt au changement climatique n'est donc pas simple : un arbre planté aujourd'hui doit à la fois s'accommoder du climat actuel... mais être toujours vivant dans le climat encore plus modifié - et notamment plus sec - que nous aurons dans 50 à 100 ans - la durée nécessaire pour qu'il devienne adulte. En plus le remplacement des arbres existants est imposé par la mortalité : "par endroits, le taux d'arbres qui meurent est tel qu'il faut d'abord récolter les arbres secs avant d'exploiter les vivants. Nous passons en situation de crise" explique Bertrand Munch. Replanter 30% du territoire avec des essences adaptées, diversifiées, indispensables à la fourniture de matériaux, d'énergie, de biodiversité, d'espaces récréatifs, et au cycle de l'eau : voilà un projet qui devrait faire l'objet d'un grand programme national mobilisant les finances publiques (un peu plus que la réalité virtuelle, le soutien aux cryptomonnaies ou les taxis volants) et justifier le renforcement de certaines filières professionnelles, non ? Et qui mériterait un peu plus de place dans les discours politiques...