--- date: '2022-07-02T09:18:41' li-id: 6948927921524781056 li-url: https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_le-discours-de-r%C3%A9volte-des-jeunes-dipl%C3%B4m%C3%A9s-activity-6948927921524781056-MYpY title: CHANGE_ME 223 --- Après d'autres jeunes diplômés, mais très certainement avant encore d'autres, des polytechniciens tout juste émoulus de l'Ecole invitent aussi à revenir à l'intérêt général dans les choix de carrière. Pour l'X, cette question n'est pas que de pure forme. Depuis longtemps sa devise est "Pour la patrie, les sciences et la gloire". "Pour la patrie", pour moi, n'est évidemment pas là pour rappeler le régime de Pétain (du reste la devise date de bien avant) : c'est une invitation à servir le pays, donc l'ensemble de nos concitoyen(ne)s ; cela s'appelle encore l'intérêt général. "Pour la gloire" ne signifie pas plus qu'il vaut viser la notoriété, mais au contraire que les intérêts personnels de pouvoir, de rémunération ou de notoriété doivent être vus comme secondaires au regard de l'intérêt intrinsèque de ce que l'on fait. Il faut entreprendre - même au sein de l'administration - sans rien espérer en retour que d'avoir fait quelque chose d'utile. Enfin "pour la science" n'est pas, enfin à tout le moins pas pour moi, une manière de dire qu'il faut à toute force travailler à la création d'objets techniques. Il faut plutôt y voir que, quelle que soit la manière d'orienter l'action proposée, il faut le faire en accord avec les faits. C'est une invitation à procéder dans l'ordre observer - comprendre - agir. Dans le discours de mes jeunes camarades il y a autre chose que je trouve intéressant : leur invitation faite aux alumnis (les anciens, donc ceux qui sont aux manettes actuellement) de s'occuper un peu plus sérieusement des limites planétaires. Car refuser, quand on est jeune diplômé, d'aller travailler du côté obscur de la force est une (bonne) chose, mais cela ne remplace pas l'action résolue de ceux qui ont le pouvoir actuellement, et ceux-là ne sont pas tout juste sortis d'école. Il est donc légitime que la génération des 20-25 ans demandent à ceux qui en ont 30 à 40 de plus de "s'engager". A la fin du mandat de Macron II, il faudrait que les émissions planétaires aient baissé de presque 25% pour éviter de tuer tous les coraux, de diminuer la production agricole méditerranéenne de plusieurs dizaines de %, de tuer plusieurs dizaines de % de la forêt française, et de placer un milliard d'être humains dans des zones où il ne sera pas possible de sortir en extérieur sans se retrouver dans un hammam géant, au risque d'en mourir en quelques heures. Car tout cela se produit déjà dans un monde à 2°C, et éviter ce monde suppose de baisser les émissions planétaires de 5% par an dès maintenant. Ce programme là, il n'y a que ceux qui sont actuellement au pouvoir - ce qui va de ma génération à celle juste en dessous - qui peuvent l'appliquer. Les jeunes ont raison de le rappeler, même si c'est désagréable pour celles et ceux qui reçoivent le message.