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2023-02-19 11:56:01 +01:00

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2021-12-10T08:01:30 6874981375200546817 https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_cest-devenu-un-secret-de-polichinelle-activity-6874981375200546817-YlHy CHANGE_ME 459

C'est devenu un secret de Polichinelle : l'exécutif s'apprête à annoncer la mise en chantier d'EPR en France. Lors qu'un ménage fait construire un logement, il se passe de l'ordre de l'année (parfois un peu plus !) entre le moment où la décision est prise et le moment où les meubles peuvent être installés.

Pour une usine ou un hôpital le délai est parfois un peu plus long. Et pour une centrale nucléaire ? Cet article de la SFEN explique pourquoi une décision prise aujourd'hui changera physiquement la donne... dans 10 à 13 ans : https://lnkd.in/e3JFD6Xq

Il y a en effet plusieurs années entre la décision et le premier "coup de pioche" : études, consultations publiques, et processus d'autorisation demandent de 4 à 5 ans, sans lesquelles il n'y a pas de chantier qui démarre.

Ce genre de délai n'est pas rare dans le domaine des grandes installations électriques. Entre la décision de construire le barrage de Serre-Ponçon et la première électricité, il s'est écoulé 12 ans, à une époque où le dirigisme d'Etat était un peu plus marqué qu'aujourd'hui, et les étapes de "débat préalable" bien plus courtes.

C'est pour cela que dans ce domaine de l'électricité, devenu vital puisque sans électrons nous n'avons plus de monnaie (les transactions monétaires sont pour l'essentiel des transactions électroniques) ou plus de communications, l'anticipation est le maître mot. Une situation de défaut de l'appareil productif ne se corrige pas facilement à bref délai.

Même l'option "on fera du gaz parce que ca va vite et tant pis pour le CO2" ne sera pas éternellement ouverte : le gaz - énergie fossile donc épuisable - n'est pas perpétuel. Notre continent en utilise - de manière forcée - de moins en moins depuis que la mer du Nord a passé son pic, en 2005, et la Norvège en 2017. Cela nous promet une dépendance croissante aux russes et à d'autres pays extra-européens avec - tant qu'il y aura un "marché" - des prix volatils et un approvisionnement incertain.

C'est pour cela que les récents rapports publiés par RTE soulignent l'urgence de cesser de procrastiner. Et en fait cette conclusion est applicable à tout ce qui est concerné par la décarbonation : que ce soit la gestion des villes, celle de l'agriculture, de la forêt, des réseaux de transport, ou la création ou au contraire disparition de filières industrielles, le pas de temps qui sépare début des grandes manoeuvres d'un résultat dans le bon ordre de grandeur se compte en décennies ou siècles. Très très loin du pas de temps auquel raisonnent l'essentiel de nos politiques, dont ceux qui vont commencer à se disputer la place actuellement occupée par un certain Emmanuel Macron.