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2023-02-19 11:56:01 +01:00

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2022-05-16T14:04:18 6931967568656150529 https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_co2-anglo-american-teste-dans-ses-mines-activity-6931967568656150529-31_x CHANGE_ME 277

Anglo American est un géant minier opérant dans de nombreux pays pour extraire de la croute terrestre des babioles diverses qui se retrouvent ensuite partout autour de nous :

  • nickel, manganèse, minerai de fer et charbon métallurgique (tout cela sert pour l'acier)
  • cuivre
  • platinoïdes (catalyseurs, piles à combustible...)
  • et... diamants, qui restent souvent considéré comme le "nec plus ultra" de la preuve d'amour.

Mais... ces métaux et minéraux ne sortent pas de la croute terrestre tous seuls. Il faut les y aider un peu en allant faire des trous, puis en charriant jusqu'au lieu où il sera "travaillé" (purifié, raffiné, transformé...) le matériau extrait de la mine (et qui contient en quantités variable du minerai ou des pierres précieuses et de la terre ou de la roche).

Pour ce transport on utilise souvent des dumpers, énormes camions qui peuvent mesurer jusqu'à 8 mètres de haut et dont la benne transporte jusqu'à des centaines de tonnes de matériau. Bien évidemment chacun de ces engins utilise des quantités respectables de diesel pour fonctionner.

Pour "décarboner" cette opération Anglo-American va tester des dumpers à l'hydrogène. L'opérateur affiche crânement sur les véhicules "zéro émission", et, emporté par cet élan, le journaliste de Les Echos utilise aussi cette expression. A-t-il raison ?

Poser la question c'est y répondre : zéro, surement pas. Il faut toujours fabriquer le dumper, sa pile à combustible (qui contient du platine... peut-être extrait par Anglo-American, très bien placé du coup pour avoir le bilan carbone de ce métal !), ainsi que le dispositif de production d'hydrogène, et tenir compte du rendement des opérations en chaine dans tout cela.

Application pratique juste pour l'énergie : avec un panneau solaire en Afrique du Sud le kWh solaire doit être à environ 30 g de CO2 (il est à 45 en France). L'électrolyse aura un rendement de 70% et la compression de l'hydrogène ensuite de 80%. La pile à combustible a un rendement de 50%. Enfin le moteur électrique a un rendement de 80%. Rendement de chaine : 0,70,80,5*0,8 ≈ 22% de l'électricité à l'arbre moteur en supposant zéro fuite (car les fuites d'hydrogène sont particulièrement impactantes sur le climat).

Ca fait donc le kWh mécanique à ≈ 130 g de CO2 hors fabrication de la pile à combustible. C'est assurément beaucoup moins que le diesel. Ce dernier émet 300 g de CO2 par kWh thermique, et en supposant que le rendement du moteur est de 40% cela fait 750g par kWh mécanique à l'arbre moteur.

Cela n'aurait pas couté cher au journaliste de faire le calcul et d'écrire non point "zéro CO2" mais tout simplement "quasiment 6 fois moins de CO2". La presse économique, normalement à l'aise et précise avec les chiffres en euros, devrait se donner pour objectif de l'être autant avec les chiffres en carbone ! Ca serait précieux pour nourrir les débats...