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2022-08-12T16:27:12 | 6963893665953943554 | https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_le-discours-historique-de-jacques-chirac-activity-6963893665953943554-MN8P | CHANGE_ME 184 |
C'était il n'y a pas tout à fait 20 ans, puisqu'il s'agit de septembre 2002. C'était à la tribune des Nations Unies, un endroit où l'on fait parfois preuve de grandes envolées lyriques, en espérant qu'une formule fera ensuite le tour de la planète (ce qui a bien fonctionné avec le discours en question).
Quand on lit le texte complet du discours prononcé à Johannesbourg par Chirac - disponible sur https://bit.ly/3C2xffV - on se dit que tout chef d'état pourrait l'avoir prononcé à toute COP depuis qu'il y a des COP.
Et si nous regardons dans le rétroviseur, qu'avons nous fait ?
Depuis 2002, la consommation mondiale de charbon a augmenté (à fin 2021) de plus de 50%, celle de pétrole de 17% et celle de gaz de 61%. Certes les ENR ont aussi augmenté, mais macroscopiquement elles n'ont pas remplacé du fossile : elles sont venues en plus.
Les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté d'environ 30%. La biodiversité a continué à s'éroder. Les prises de poisson ont continué à diminuer (le maximum mondial était 1995 et depuis ca baisse). Etc etc.
Quelle leçon en retenir ? Que les discours dans ce genre d'enceinte n'ont malheureusement aucune espèce d'importance. Ce qui compte ce sont les actes, et il n'y a pas de lien entre les deux (dans le même esprit "make the planet great again n'a débouché sur à peu près rien de concret).
Mais c'est bien plus difficile à analyser : il faut quelques minutes pour lire le discours de Chirac à Johannesbourg. C'est l'oeuvre d'une vie de décortiquer l'adéquation avec les limites planétaires de toutes les décisions prises ou qui pourraient l'être en matière d'agriculture, de gestion de l'urbanisme ou de performance des logements et des bâtiments tertiaires, de véhicules, d'infrastructures, d'énergie, de fiscalité, d'encadrement de la publicité ou du trafic aérien, et j'en passe.
Et à chaque fois il faut décortiquer des chiffres. L'environnement, c'est comme l'économie, en beaucoup plus compliqué : il faut toujours compter pour parvenir à une conclusion, mais il ne faut pas compter qu'avec une seule unité. Les mètres cubes d'eau (qui font défaut actuellement) ne s'ajoutent pas aux tonnes de coccinelles ou aux émissions de CO2.
Il n'y a pas 36 manières de devenir sérieux : il faut y passer du temps (beaucoup de temps) et acquérir des compétences (beaucoup de compétences). Et il faut le faire en plus des sujets que l'on doit déjà gérer. C'est vrai pour les politiques ; c'est vrai pour les décideurs économiques ; c'est vrai pour chaque citoyen.
Aujourd'hui, nous regardons hélas toujours ailleurs. Nous regardons surtout des euros et nous regardons à des horizons de temps bien trop courts. "Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas" disait Chirac. Nous ne le disons peut-être pas, mais nous agissons tout comme...
Si les leçons de cet été sont retenues ou pas se verra notamment dans l'accélération - ou pas - de l'acquisition de connaissances par "tout le monde" à partir de la rentrée.