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2022-09-06T06:30:22 | 6972803161589747712 | https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_la-piste-dun-cr%C3%A9dit-dimp%C3%B4t-recherche-activity-6972803161589747712-PQsa | CHANGE_ME 158 |
6 milliards d'euros de dépense publique servent chaque année à soutenir la recherche et développement dans les entreprises. Cela s'appelle le crédit impôt recherche (CIR) et le crédit impôt innovation. Le principe est le suivant : si une entreprise peut justifier qu'elle a financé des dépenses de R&D ou d'innovation avec un résultat qui n'était pas "garanti à l'avance" (donc avec une prise de risque), l'Etat paye 20% (innovation) à 30% (recherche) des couts (https://bit.ly/3AThsOf ).
Un certain nombre de personnes - dont votre serviteur - soutiennent que, si le projet de la société est de décarboner l'économie, alors il faut rendre ce crédit impôt recherche conditionnel sur la question du carbone.
Une première manière est de créer une taxonomie et de n'accorder ce crédit impôt que pour des recherches qui visent à améliorer des objets qui sont réputés concourir à la décarbonation. Si l'on choisit cette règle, cela signifie que les recherches sur les pompes à chaleur, les vélos électriques, le nucléaire ou les matériaux d'isolation sont éligibles, mais pas la recherche pour proposer une nouvelle gamme de boissons sucrées ou de mobilier de salon.
Une variante est de faire non point une liste verte mais une liste noire. A ce moment on exclut le CIR si l'entreprise qui le demande opère dans certains champs d'activité (typiquement l'extraction ou l'utilisation de combustibles fossiles).
Cette règle a l'avantage d'une relative simplicité (l'administration fiscale dispose d'une liste éligible ou d'une liste à exclure, et vérifie que l'entreprise s'occupe des bons produits ou services pour accorder le CIR). Elle a l'inconvénient de ne pas garantir que les activités de l'entreprise substituent des usages carbonés et non s'y rajoutent.
Par exemple si on considère que les vélos sont décarbonants, on ne s'occupe pas de savoir si les clients en achètent pour aller en faire le week-end (éventuellement en utilisant d'abord une voiture !), sans effet sur la baisse des émissions, ou s'ils remplacent un engin motorisé pour une partie des déplacements du quotidien.
Une deuxième manière serait de demander à l'entreprise qui réclame le CIR de faire la preuve que ses produits substituent des usages plus carbonés, quels que soient les produits ou services vendus. A ce compte là, une entreprise qui vend des vélos à des personnes qui s'en serviront pour ne pas prendre une voiture est éligible, mais pas celle qui vend des vélos à des personnes qui commenceront par le mettre dans la soute d'un avion pour aller se promener ailleurs.
Cette règle est bien plus complexe à mettre en oeuvre, mais a pour but d'avoir une garantie sur le résultat.
Les dépenses de R&D des entreprises conditionnent très fortement ce qu'elles feront ou pas à l'avenir. Leur dire que la collectivité ne les aide pas à prendre de risques si leurs plans pour l'avenir ne sont pas compatibles avec la baisse des émissions serait juste une forme de bon sens.