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2023-02-19 11:56:01 +01:00

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2022-12-19T19:37:11 7010689509977653249 https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_cop15-les-entreprises-incit%C3%A9es-%C3%A0-divulguer-activity-7010689509977653249-f_XO CHANGE_ME 55

Fin du monde contre fin du mois : l'agenda présidentiel a factuellement penché du deuxième côté pendant la semaine qui vient de s'écouler. La préservation contre la fin du monde - comprendre la défense de la biodiversité - n'aura justifié aucun déplacement de haut niveau pour soutenir les négociateurs français et européens, pourtant crédités du succès obtenu au Canada par notre premier magistrat sur ce réseau (https://bit.ly/3FDV9P2 ).

Le Qatar et le foot (à moins que ce ne soient le foot et le Qatar) auront donc vu deux fois les roues de l'avion présidentiel (dont Sud Ouest a évalué l'empreinte carbone : https://bit.ly/3Webuky ) en une semaine, la cote de popularité et le gaz ayant manifestement des charmes que les papillons et coraux n'ont pas.

Pourtant, si l'on replace les choses dans le bon ordre, sur une planète sans espèces végétales et animales (c'est cela la biodiversité), il va être un peu difficile d'organiser des tournois de foot... et tout aussi difficile de faire tourner une économie. Incidemment, l'article des Echos ci-dessous contient la phrase "Il faut rappeler que plus de la moitié du PIB mondial est tributaire de la biodiversité et de ses services.". Objection votre honneur : c'est 100% puisque sans espèces animales et végétales il n'y a plus d'humanité et plus de PIB du tout !

La presse qualifie cet accord de succès parce que les aires protégées doivent monter à 30% de la surface terrestre. Mais la vraie victoire, elle sera à chercher, ou pas, dans les réglementations nationales - ou éventuellement les accords commerciaux - qui imposeront des obligations concrètes aux acteurs domestiques.

Car on peut appeler "protégée" une zone qui en pratique ne l'est pas (par exemple une aire marine protégée qui est chalutée comme si elle ne l'était pas), ou encore créer une réserve avec 3 gardes et demi pour des milliers de km2, qui restent en pratique soumis aux mêmes pressions qu'avant ou presque.

Les obligations de transparence créées pour les entreprises sont une étape bienvenue, mais le Diable sera aussi dans les détails. Pour le moment, les méthodes sont émergentes (nous le savons à Carbone 4 pour travailler dessus !), et les moyens alloués par les acteurs économiques pour "bien compter" les pressions environnementales (biodiversité ou climat) restent bien plus faibles que pour les euros. On peut aller en prison quand on compte l'argent de travers (fraude fiscale, comptabilité non tenue, etc), mais c'est rarement le cas quand on compte le CO2 ou la biodiversité de travers !

Le vrai sérieux des pays ratificataires se mesurera donc à l'aune de ce qu'ils seront capables d'imposer à leurs acteurs domestiques. Pour la biodiversité, comme pour le climat, il va falloir y consacrer un peu plus de temps que celui de simples félicitations adressées entre deux avions pour aller voir un match.