jancovici-updates/true_content/posts/2021/10/change-me-547.md
2023-02-19 11:56:01 +01:00

2.7 KiB

date li-id li-url title
2021-10-17T08:45:58 6855423618524971008 https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_hedge-funds-cash-in-as-green-investors-dump-activity-6855423618524971008-dfeG CHANGE_ME 547

Au sein du monde financier, une des "stratégies" pour décarboner un portefeuille est de se séparer de ce qui s'appelle les "actifs bruns". Ces derniers consistent en les actions et obligations émises par des entreprises ayant des activités significatives dans les combustibles fossiles (extraction, transformation et vente de charbon, pétrole et gaz).

Question : est-ce que le monde se porte mieux après cette opération ? Non, répond le très sérieux Financial Times, qui explique que cela peut par exemple avoir comme seule conséquence d'enrichir des fonds d'investissement peu soucieux de cet aspect des choses. L'activité sous-jacente ne disparaît pas parce que son capital ou sa dette change de propriétaire. Pour faire disparaître l'activité sous-jacente, il faut que ce soit la réglementation qui change, ou que l'actionnaire décide de lui-même de la fermer ou transformer.

Dans nombre de cas de figure, il peut donc être plus efficace de rester investi sur une entreprise qui ne fait pas ce qu'il faut pour l'influencer de l'intérieur. Question à nouveau : est-ce que l'entreprise après transformation est aussi rentable qu'avant ? Malheureusement la réponse n'est pas nécessairement positive.

Le climat va donc souvent mettre l'actionnaire ou le prêteur en demeure de devoir choisir entre le rendement et sa conscience. Et, souvent, l'actionnaire ou le prêteur en bout de chaine c'est... nous. Toutes celles et tous ceux qui ont de l'assurance vie, un PEA, une retraite par capitalisation (ce qui est la norme dans de très nombreux pays, soit en régime principal, soit en régime complémentaire), un compte épargne en actions, un fonds commun de placement, et encore quelques instruments financiers sont en pratique les actionnaires et les prêteurs des sociétés qui doivent se transformer.

La bonne question est donc de savoir qui est prêt à prendre le risque de voir le rendement de son assurance vie baisser parce que le gestionnaire de notre épargne tanne le monde de l'entreprise pour qu'elle agisse contre le changement climatique, fût-ce au détriment de ses performances financières.

Il reste encore beaucoup de malentendus dans l'univers de l'épargne et de la finance sur la compatibilité de cette activité avec la baisse des émissions. Il serait utile que tous ses protagonistes (jusqu'aux épargnants finaux) comprennent un peu mieux de quoi il retourne, pour ne pas croire que des mesures simples - voire simplistes - suffisent pour traiter la question.