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2022-05-17T12:13:14 | 6932302009039519744 | https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_linde-suspend-ses-exportations-de-bl%C3%A9-le-activity-6932302009039519744-7Yiw | CHANGE_ME 276 |
Je dois dire que j'ai été surpris de découvrir, à l'occasion de cette nouvelle largement diffusée (que l'Inde n'exporterait pas de blé cette année), que le pays le plus peuplé de la planète (à parité avec la Chine), et disposant de 4 fois moins de surface cultivable par personne (0,14 hectare) que la moyenne mondiale (un peu au-dessus de 0,6 hectare) était... exportateur de céréales.
De même, alors que la production de céréales par personne et par an est proche de 400 kgs en moyenne mondiale (données Banque Mondiale et graphique en commentaire), cette valeur n'est que de 220 kgs en Inde, soit 40% de moins. A titre de comparaison, cette valeur est de une tonne (de céréales par personne et par an) en France, de 1,4 tonne aux USA et de 800 kgs en Russie.
Comment un pays qui produit aussi peu (enfin relativement aux autres grands exportateurs) peut-il dégager un surplus ?
Une des explications possibles vient peut-être de l'utilisation de ces céréales : l'Inde produit 40% de viande de boeuf en moins que la France (alors que sa population est 20 fois plus nombreuse), 7 fois moins de viande de porc, et "seulement" 3 fois plus de volaille (donc en fait 6 fois moins par habitant). L'espérance de vie à la naissance y est de 70 ans.
Il n'en reste pas moins que cette décision indienne a contribué à faire grimper les prix des céréales au plafond pour les échanges internationaux. Cela va contribuer à rendre encore plus difficile l'accès (économique) à la nourriture dans les pays fortement importateurs (dont plusieurs pays d'Afrique du Nord).
Cette nouvelle n'est hélas qu'une demi-surprise : avec une population planétaire en hausse, des approvisionnements agricoles qui vont être négativement impactés par le changement climatique et/ou l'accès plus difficile à l'énergie (gaz pour les engrais, pétrole pour la mécanisation et le transport aval, gaz et pétrole pour les phytosanitaires) la seule question est de savoir à quel rythme et à quel horizon de temps on verra apparaître des tensions croissantes.
Notre nouvelle première ministre arrive pile dans une petite répétition générale de ce qui sera de plus en plus notre quotidien : des conditions de température et de précipitations pas sympathiques, un accès à l'énergie plus difficile, des chaines mondialisées perturbées, et une inflation qui va en conséquence devenir plus ou moins structurelle, du moins exprimée en nombre d'heures de travail nécessaires pour se payer quelque chose.
Nous ne pouvons pas faire grand chose à court terme en ce qui concerne la production céréalière en dehors de nos frontières. Par contre nous devrions nous doter aussi vite que possible d'une boite à outils appropriée pour anticiper et planifier avec le monde tel qu'il va être, et non tel que l'on aimerait qu'il soit.