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2022-06-05T09:44:52 | 6939150039390822400 | https://www.linkedin.com/posts/jean-marc-jancovici_lenvol-contrari%C3%A9-de-la-voiture-%C3%A9lectrique-activity-6939150039390822400-Oay2 | CHANGE_ME 256 |
C'est l'un des paradoxes de la transition telle que nous l'imaginons le plus souvent : elle a besoin que le problème à résoudre... soit toujours là !
Explication de cette petite énigme : ce qui a permis la mondialisation, c'est l'abondance énergétique. Il faut du pétrole pour alimenter les camions et bateaux permettant de trimballer des milliards de tonnes de matières ou marchandises d'un bout à l'autre de la planète. Il faut du charbon pour alimenter les hauts fourneaux et les centrales électriques qui ont permis de fabriquer en masse ici ce qui sera consommé loin de là. Il faut du gaz pour faire une partie de l'électricité et de la chaleur industrielle qui participent de ce système.
Du coup, une conséquence logique de la décarbonation sera la... démondialisation. La flotte mondiale comporte 100.000 bateaux de plus de 100 tonnes de port (https://bit.ly/3ziS99g ), et ce n'est pas avec juste des bateaux à voile ou à rames que nous allons conserver la même capacité de transport (2,1 milliard de tonnes de port).
Dans une économie démondialisée, les pays qui n'ont pas de mines ne fabriquent ni batteries, ni panneaux solaires, ni voitures électriques. Et on le voit à l'expérience grandeur nature de légère démondialisation que le covid puis l'Ukraine nous offre en ce moment.
Comme l'explique cet article des Echos, alors même que la flotte mondiale de voitures électriques atteint péniblement un peu moins de 2% du total des voitures en circulation, les fabricants font déjà face à des problèmes de production à cause de composants électroniques qui ne sont produits que dans certaines parties du monde. Ils se demandent déjà si il n'y aura pas des problèmes de fourniture de métaux critiques à cause de mines situées "loin de l'usine".
Les fabricants de panneaux solaires et d'éoliennes sont eux aussi mondialisés. 95% des panneaux viennent désormais de Chine (donc ils ont notamment besoin de porte-conteneurs), et pour l'éolien ce pays commence aussi à tailler de plus en plus de croupières aux fabricants européens. Et, comme pour les voitures, la petite démondialisation récente a inversé la baisse de cout des ENR modernes, qui augmentent depuis 2 ans : https://bit.ly/3MlQcLX
Avec une économie redevenant physiquement "locale", comment installer en France des centaines de milliers d'éoliennes et de panneaux alors que nous n'avons plus de mine de fer, ni de cuivre, ni de nickel, ni de charbon métallurgique ?
Il s'avère donc que pour gérer la décarbonation par des voies essentiellement "technologiques" nous avons besoin de la mondialisation... qui est carbonée. Le fait de prendre les problèmes avant tout sous l'angle économique ne permet pas de voir cette incohérence. Une autre manière de dire la même chose est que les baisses de cout et les hausses de volume obtenues dans une économie mondialisée ne sont pas du tout garanties dans une économie démondialisée, loin s'en faut.