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2023-02-19 11:56:01 +01:00

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date: '2022-11-08T07:46:06'
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title: CHANGE_ME 95
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Dans le chapitre "industrie" du Plan de Transformation de l'Economie Française (https://lnkd.in/esiqHkbf), nous avions fait le constat que les 3/4 des émissions directes (donc hors émissions associées à la consommation électrique du secteur, et bien évidemment hors émissions du "scope 3") du secteur industriel en France viennent de 3 activités qui représentent chacune environ un quart du total du secteur :
- l'aciérie
- la cimenterie et activités connexes (production de chaux par exemple, mais le ciment domine de la tête et des épaules)
- la chimie de base (production des monomères, de la soude et du chlore, de l'hydrogène, etc).
Nos propositions permettaient de viser, pour ces secteurs, une division par 5 à 10 des émissions à l'horizon 2050 - ce n'est pas encore la neutralité mais on s'en rapproche - en combinant sobriété - il y a une baisse des volumes - et avancées techniques (par exemple la réduction directe à l'hydrogène dans la métallurgie ou un mélange de capture et séquestration du carbone et de combustibles non fossiles dans la cimenterie).
Je ne sais pas si l'Elysée a lu le PTEF, mais l'événement rapporté par Les Echos s'inscrit dans la même logique : porter une attention particulière aux sites fortement émissifs, où la décarbonation va souvent avec des investissements lourds qu'il faut donc pouvoir "sécuriser".
"sécuriser" signifie en pratique que, sur leur durée de vie, ces investissements vont éviter plus de couts qu'ils n'en engendreront. La logique est que, comme les sites gros émetteurs sont soumis aux quotas, et que ces derniers sont désormais payants, tout le CO2 non émis peut se convertir en quotas non achetés, et cet argent peut être mis en face de l'amortissement de l'investissement réalisé.
Pour que le système fonctionne bien, il y a un point que cet article n'évoque pas : la garantie d'un prix élevé et stable du CO2 à l'avenir. Le marché ne peut pas garantir cela. Il faut donc que la puissance publique s'en mêle, or pour le moment la Commission (car cela dépend d'elle) est rétive à l'idée de mettre un prix plancher aux quotas mis aux enchères.
Le deuxième point qui n'est pas évoqué est la protection aux frontières : si les couts de production domestiques qui n'engendrent que peu de CO2 sont supérieurs à ceux des concurrents étrangers qui émettent plus, il faut pouvoir compenser la différence aux frontières (comme pour la TVA).
Dans les commodités certaines voyagent peu en pratique (le ciment), mais d'autres beaucoup plus (acier ou polymères). Si l'Etat veut que les industriels avancent - et il a raison de le vouloir - il faut qu'il fasse sa part dans la planification, en s'occupant des deux éléments évoqués plus haut. Une troisième alternative est qu'il prenne à sa charge les investissements des industriels, en allant éventuellement jusqu'à une nationalisation ou une cogestion - une éventualité aujourd'hui très peu compatible avec l'orientation économique libérale, mais l'histoire n'a pas fini d'être écrite !