jancovici-updates/true_content/posts/2022/12/change-me-70.md
2023-02-19 11:56:01 +01:00

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date: '2022-12-04T18:39:17'
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title: CHANGE_ME 70
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La biomasse est-elle "neutre en carbone" ? Dit autrement, lorsque l'on utilise de la biomasse (du bois bûche, des granulés de bois, du biogaz, un "biocarburant"), peut-on compter pour zéro les émissions de CO2 issues de la combustion du carbone organique contenu dans les végétaux utilisés ?
Oui disent généralement les inventaires d'émission (dont le bilan carbone). Oui, dit actuellement la réglementation européenne ou française. Certes il faut compter le carbone fossile utilisé pendant le procédé de transformation qui va de la plante jusqu'au vecteur énergétique qui sera utilisé (par exemple pour de l'éthanol qui remplace de l'essence, il faut compter le carburant et la fabrication du tracteur, la distillation du "jus" obtenu après fermentation des betteraves ou du maïs, et encore quelques bricoles), mais le carbone qui était contenu dans la plante, non.
Ca se discute, explique un "commentaire" paru dans Nature (un "commentaire" est un article qui ne donne pas lieu à un processus de revue par les pairs, la rédaction de la revue décidant seule si elle le prend ou pas). Car si l'on regarde au plan mondial, il y a de la déforestation nette pour obtenir de nouvelles surfaces agricoles.
Si l'Europe rajoute des cultures énergétiques en plus des cultures alimentaires, il faut disposer de plus de surface au total. Soit l'Europe déforeste chez elle, soit elle importe directement de la biomasse énergétique, et alors elle va accroître encore plus la déforestation à l'extérieur, par effet de domino si ce n'est en direct.
Si la population de l'Europe continue d'augmenter un peu, et que les régimes alimentaires ne changent pas, le recours accru à la biomasse est donc assuré d'engendrer plus de déforestation de manière globale.
Incidemment, les auteurs ont postulé - de manière surprenante puisque le GIEC souligne abondamment le risque d'un stress accru sur les rendements agricoles - sur une augmentation à l'avenir des rendements des cultures. Si l'on enlève cette hypothèse optimiste, la conclusion est encore plus nette.
Il y a 20 ans, nous aurions pu choisir d'économiser du gaz et du pétrole essentiellement par une baisse de la consommation (consommation des véhicules neufs baissant bien plus vite, trafic aérien limité en volume, rénovation plus vigoureuse des bâtiments), ce qui aurait permis de diminuer la quantité de pétrole et de gaz utilisés sans avoir besoin de compenser par la biomasse.
Et aujourd'hui ? L'option nucléaire en plus comme l'option électricité ENR en plus prenant des décennies pour des quantités significatives, et la rotation du parc (de voitures, de bâtiments rénovés) étant lente, si nous voulons faire manger de la biomasse à nos voitures et nos bâtiments existants, il faut en manger moins nous-mêmes, sauf à sacrifier un peu plus la biodiversité. Il n'y a qu'un sol !